SOVAPE était invitée par la Commission européenne (DG SANTE) à participer le jeudi 10 février 2022 à un webinaire intitulé « Les nouveaux produits du tabac et de la nicotine dans les politiques de lutte antitabac ».
Nous vous reportons la prise de parole de la Présidente de SOVAPE ci-dessous traduite en français. Le temps d’intervention imparti était de cinq minutes. Une douzaine d’autres associations d’usagers, de professionnels de santé et de scientifiques sont intervenues. L’European Tobacco Harm Reduction Advocates (ETHRA), qui regroupe 25 associations dont
SOVAPE.
La Commission européenne a imposé, par « soucis de transparence », que le webinaire se déroule sous la surveillance d’observateurs de deux organismes privés se présentant comme organisations de lutte antitabac nommées European Network for Smoking Prevention et Smoke-Free partnership. La réciproque ne semble pas être prévue, notre question a été ignorée par la Commission.
En dépit de cette atmosphère étrange, la rencontre était très stimulante par la qualité et l’intelligence des participants. La Commission tiendra-t-elle compte des divers éléments présentés est une question en suspens.
Dans les semaines prochaines, le Conseil européen doit se prononcer sur une révision de la directive des accises du tabac (TED), dans laquelle les produits de vapotage pourraient être incorporés. La directive sur les produits du tabac (TPD), dans laquelle le vapotage est traité comme produit connexe, devrait être révisée à l’horizon de 2023 selon la Commission.
Prise de parole de SOVAPE
Bonjour, je suis Nathalie Dunand, présidente de SOVAPE, une association à but non lucratif, membre d’ETHRA. Nous n’avons aucun lien avec l’industrie du tabac ni de la pharmaceutique.
Merci de nous avoir invités à cette réunion, même si nous n’en comprenons pas bien les objectifs. Les décisions de taxer le vapotage et d’interdire les arômes dans les
eliquides semblent avoir été déjà prises sans en évaluer l’impact ni prendre en compte les recommandations des utilisateurs.
En tant qu’association prônant la réduction des risques liés au tabagisme, SOVAPE a fait connaître son point de vue à chaque occasion lors des consultations organisées par la Commission. SOVAPE a développé des arguments détaillés et documentés, mais qui n’ont jamais été pris en compte. En clair, la Commission exclut a priori une politique de réduction des risques. Une position que nous regrettons.
Notre association est composée d’anciens fumeurs qui, comme beaucoup d’autres, ont pu arrêter de fumer grâce à la vape. Nous avons été enthousiasmés par la facilité d’arrêter de fumer avec ce produit et nous avons voulu partager avec d’autres l’espoir et la libération que représente la sortie du tabagisme. L’utilisation de la
vape a suscité une vague massive d’entraide pour arrêter de fumer. Ce mouvement spontané s’est propagé sans le soutien des autorités sanitaires.
Cependant, notre enthousiasme a été vite douché.
Nous sommes allés de déception en déception au fur et à mesure que les positions de la lutte antitabac ont émergé. À commencer par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS). Dès 2012, l’OMS a donné le ton en prônant l’interdiction des « cigarettes électroniques », un produit qui apporte de l’espoir aux fumeurs et en mesure de créer une dynamique d’entraide.
L’OMS s’est rangée du côté des prohibitionnistes, en utilisant des idées préconçues et une science immature qui nuisent aux fumeurs au lieu de les aider. Cette ligne dure a été suivie par la Commission européenne en 2013, lorsqu’elle a proposé une réglementation uniquement médicale du vapotage, refusée ensuite par le Parlement européen.
En 2014, nous avons assisté à la discussion et à l’adoption de la TPD2, qui a renouvelé l’interdiction du SNUS – sauf en Suède. La Suède a le taux de tabagisme de loin le plus bas de l’UE – mais pas le taux le plus bas de consommateurs de tabac. Cependant, la Suède a le taux le plus bas de cancers liés au tabagisme chez les hommes ! Le snus en Suède démontre l’efficacité de l’adoption par le public d’une solution de réduction des risques.
En ce qui concerne le vapotage, certaines dispositions de la TPD sont positives pour la protection des consommateurs. D’autres, en plus de n’avoir aucun intérêt en termes de santé publique, entraînent une surconsommation de plastique, augmentent les coûts et conduisent à des pratiques de contournement. Par exemple, la limite de 10 ml pour les flacons d’e-liquide, la limite de 2 ml pour les réservoirs, l’absence de dispositifs contenant plus de 20 mg/ml de nicotine.
Les avantages du
vapotage et les conditions d’efficacité du dispositif sont ignorés, comme l’illustre le rapport du Scientific Commitee on Health, Environmental and Emerging Risks (SCHEER), commandé par la Commission pour évaluer uniquement les risques absolus.
Cette approche politique repose sur une doctrine a priori, un rejet systématique de la réduction des risques, avec pour seule réponse réglementaire interdiction et taxation.
Les approches de réduction des risques sont de grandes réussites de santé publique
Les décisions prévisibles annoncées lors des Rencontres européennes de l’INCa la semaine dernière vont enterrer le vapotage légal comme outil de réduction des risques du tabagisme. L’énorme déception du public, dont nous nous faisons l’écho ici, mine la confiance dans les autorités sanitaires et dans l’Union Européenne.
Actuellement, les approches de réduction des risques en Nouvelle-Zélande et au Royaume-Uni avec le vapotage ou en Norvège et en Suède avec le SNUS sont de grandes réussites de santé publique. Il est malheureux que la Commission européenne ait décidé a priori de les ignorer.